Édito: L’interdiction des téléphones portables à l’école au Tchad, une décision à nuancer

L’arrêté n° 344/RT/MENPC/SEENPC/SG2024, émis par le ministre de l’Éducation nationale et de la Promotion civique du Tchad, interdisant l’usage des téléphones portables par les élèves dans les établissements scolaires, qu’ils soient publics, communautaires ou privés, suscite un débat qui mérite d’être approfondi. Cette décision, bien qu’elle vise à créer un environnement d’apprentissage moins distrayant, soulève d’importantes questions quant à son impact sur le système éducatif déjà fragile du pays
Dans un contexte où le Tchad fait face à de nombreux défis en matière d’éducation — tels que le manque d’infrastructures adéquates, le faible taux de scolarisation et un encadrement souvent limité — l’interdiction des téléphones portables peut sembler être une réponse rapide à une problématique complexe. D’un côté, nombreux sont les enseignants et les parents qui constatent que les téléphones portables détournent l’attention des élèves, nuisant ainsi à leur capacité d’apprentissage. L’intention de favoriser une atmosphère plus studieuse est louable, et l’idée d’élever le niveau éducatif est essentielle pour l’avenir de notre pays
Cependant, cette mesure ne doit pas occulter le potentiel que représentent ces appareils. Dans une nation où l’accès à Internet demeure limité, les téléphones portables peuvent être des outils d’apprentissage précieux, offrant aux élèves l’opportunité d’accéder à des ressources en ligne et de s’initier à l’auto-apprentissage. En interdisant leur usage, le ministre pourrait priver les jeunes d’une occasion d’enrichir leur éducation, surtout dans un pays où les ressources pédagogiques sont souvent rares
Il est également important de considérer la manière dont cette mesure sera appliquée. Les établissements scolaires du Tchad, souvent confrontés à des défis d’encadrement, devront naviguer entre la discipline et la nécessité d’enseigner aux élèves un usage responsable des technologies. Plutôt que de se concentrer uniquement sur l’interdiction, une approche éducative visant à sensibiliser les élèves aux dangers et aux usages appropriés des téléphones pourrait offrir une solution plus équilibrée
Nous ne devons pas perdre de vue que derrière ces statistiques sur le système éducatif se trouvent des jeunes avec des rêves et des aspirations. Chaque élève est un potentiel acteur de changement et mérite un environnement qui leur permet de s’épanouir. La décision du ministre est un appel à la réflexion sur comment nous, en tant que société, pouvons mieux soutenir nos enfants dans leur parcours éducatif
En somme, cette décision ouvre la porte à un débat nécessaire sur le rôle des technologies dans l’éducation au Tchad. Il est crucial d’engager un dialogue inclusif avec tous les acteurs concernés — enseignants, parents et élèves — afin de trouver des solutions adaptées aux réalités de notre pays. L’objectif ultime devrait être d’assurer un environnement scolaire qui préserve la concentration des élèves tout en intégrant judicieusement les outils numériques, car l’éducation de demain doit se construire aujourd’hui.